14 avr. 2011

L’EMERGENCE DU GABON : VERITABLES ECURIES D’AUGIAS

Le projet qui consiste à insérer le Gabon dans la galaxie des pays qualifiés d’émergents est un pari, une mission et un défi nobles mais ô combien compliqués. Pour bien peser et appréhender l’immensité et la difficulté de son exécution, il faut avoir une parfaite connaissance de la situation économique, financière, sociologique, psychologique et morale globale du pays au début de sa mise en œuvre.
 

Augias était un Roi de la Grèce antique. Il possédait d’immenses écuries dont le nettoyage, pour leur salubrité, nécessita un travail colossal. Aussi, le Roi fit appel à un demi-dieu dépositaire d’une force extraordinaire, un « Hercule » qui exécutait des travaux considérés comme particulièrement difficiles,  voire impossibles pour le commun des mortels. Au nombre de ses performances, outre ses douze travaux, se trouve le nettoyage des écuries du tout puissant Augias et, comme tous les bienfaiteurs, le demi-dieu mourût atrocement en se jetant dans les flammes qui symbolisent l’enfer. 

Depuis l’indépendance du Gabon, et plus concrètement, depuis quarante-quatre ans, il s’est rarement élevé dans le Pays un citoyen ou un groupe de citoyens ayant le talent et l’audace d’initier une action politique et républicaine qui ait entrainé la majorité des habitants dans un durable programme de développement. C’est l’animation politique, essentiellement féminine, à travers les chants de gloire et les danses frénétiques qui a été le domaine d’une mobilisation efficace et continue. Hommes et femmes, jeunes, adultes et vieux, comme un seul individu, se sont rendus disponibles pour honorer la cocarde du parti unique et de ses multiples stipendiés en se prosternant, en tant que de besoin, devant l’effigie et l’emblème du Parti du « Grand Camarade ». 

Quand on place le politique, à ce point, au summum des préoccupations et des activités d’un Etat, la conséquence inévitable est que l’action économique et sociale des gouvernants est ramenée à un niveau subalterne et donne de mauvais résultats. 


Cinquante et une (51) années après l’indépendance du pays et cinquante trois (53) ans après le début de l’exploitation de son pétrole, le Gabon est réduit à casser sa capitale Libreville pour faire la démonstration d’une politique transformatrice de notre cadre de vie. Pourquoi n’a-t-on pas  pris conscience à temps du fait que la population, le nombre de véhicules, les besoins en logements, en salles de classes, en dispensaires, en nourriture, en électricité, en eau, bref que tout ce qui concoure au mieux vivre des citoyens évoluait en courbe ascendante, et en étroite relation avec le nombre de ses habitants?  

Gouverner c’est prévoir. Que penser de ce que le Gabon, pays pétrolier, vient de lancer en 2011 un audit pour savoir comment les choses se passent dans ce secteur, de l’aérogare de Libreville qui conserve toujours son allure d’aéroport de campagne, de Libreville qui n’a point de gare routière digne de cette appellation, de son réseau routier qui est très insuffisant et en très mauvais état, de son Administration qui est inefficace, partiale et minée par l’ethnisme. Pour émerger, tout cela devrait être intégré dans une nouvelle logique d’ensemble pour avancer et progresser. 

La vaste opération de casse des maisons le long des rues de Libreville et de la nationale constitue un aveu des mauvaises pratiques et de la gestion catastrophique qui ont été celles des Gouvernants successifs du pays des dernières décennies et que le pouvoir actuel s’acharne à vouloir corriger. Un aveu qui nous dit que les actions étaient conduites sans planification, sans méthode et sans contrôle. Les occupations de terrains et les constructions anarchiques, le minable tracé du réseau routier et surtout l’absence d’un véritable centre ville avec des zones commerciales et des zones administratives du fait de l’inapplication d’un schéma d’urbanisme, l’inexistence des parkings et des rues piétonnes etc. Toutes ces tares font de Libreville un lieudit que les étrangers et les habitants de l’intérieur du pays qui y arrivent pour la première fois ont du mal à considérer comme la capitale de l’un des premiers pays pétroliers de la sous région. 

Déjà, à l’entrée de la ville, à Melen, le nouvel arrivant est surpris par la qualité de l’état des lieux : porte de la ville insignifiante, routes enfoncées, étroites et encombrées, odeurs nauséabondes qui nous rappellent l’un des trois Albert les plus célèbres du Gabon passé, le mélomane  EMVO Albert qui composa une chansonnette qui dénonçait déjà la misère et l’insalubrité dans Libreville. C’est en partant de ces réalités physiques et objectives, sans encore aborder les entraves liées aux mentalités  que les nouveaux gouvernants veulent faire du Gabon un pays émergent. 

Plutôt que de vouloir faire du neuf en partant du vieux, ne pouvait-on pas choisir de partir sur d’autres bases ? Ne pouvait-on pas engager un vaste chantier pour l’édification d’une nouvelle ville en prévoyant sa construction sur plusieurs années ? Il y a assez de place et d’espace au Gabon pour ce faire. Pourquoi toujours casser l’existant ? Certes cette fois, la casse touche surtout les cases placées aux abords des rues. Signalons que l’on avait démoli une partie de l’ancienne ville qui s’étendait du cercle des métis, situé à l’emplacement actuel de la CNSS, à Ste Marie avec au passage, le petit bijou architectural colonial formé par le palais du Gouverneur, l’église St Pierre, la Chambre de Commerce, le stade de football, la première salle de cinéma de Libreville «  Le Club », les maisons coloniales, le magasin CCDG, le marché du bord de mer etc. 

Les actions de développement, qui sont par essence structurelles, ne doivent obéir et se soumettre que rarement à contingences conjoncturelles. Or, au Gabon, le conjoncturel a souvent guidé le structurel. C’est ainsi que le sommet de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) qui s’est tenu à Libreville en 1977 a imposé la réalisation, à grande vitesse, de certaines infrastructures. Trente quatre (34)  ans plus tard, c’est la course pour l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) qui explique largement l’ouverture de multiples chantiers qui doivent causer bien des soucis au tout jeune nouveau pouvoir du Président Ali Bongo et de son premier Premier Ministre qui auraient du, dès après la prise en mains du pays, démontrer et reconnaitre publiquement que l’organisation de la CAN dans des conditions idoines était hypothétique. Le Gabon devait renoncer à Co-organiser la CAN avec la Guinée Equatoriale. Nous souhaitons que tout se passe au mieux pour le Gabon. L’on peut comprendre la difficulté qu’il y a à hériter d’une situation qui s’apparente aux écuries d’Augias quand on est ni un Hercule, ni un magicien. Sans passion, sans émotion et sans sentimentalisme, le régime de l’Emergence doit rompre, s’il en a la capacité, avec ce qui relève de l’ancien système PDG-Rénovation,  en particulier sa mauvaise gouvernance financière et ses mauvaises pratiques politiques, économiques et sociales. 

Le Gabon a suffisamment de potentialités pour qu’une politique sociale plus hardie en faveur des plus vulnérables soit mise en évidence par les gouvernants. Un Gouvernement œuvre d’abord en faveur de ses citoyens nationaux avant de partager avec l’étranger en enrichissant certains fumistes et autres individus sans moralité, sans états d’âme, peu vertueux, arrogants et avides de plaisirs. Nous savons que depuis des décennies, pour moult raisons, le Gabon engraisse des gens d’ailleurs. Nous savons aussi que des gens d’ailleurs nous imposent des processus qui peuvent causer des difficultés entre nous. Nous savons tout cela mais le peuple reste calme, par peur, par pudeur ou par sagesse. Toutefois, la Vérité se loge dans l’avenir, quand surgira un groupe d’hommes et de femmes patriotes qui n’accepteront aucun compromis, aucune compromission, aucun dictat. 

Le Président ALI s’est donné pour mission de faire du Gabon un pays émergent. S’il affiche cette volonté d’émerger, c’est qu’il existe des choses immergées qui doivent être identifiées, mises en exergue et traitées correctement. Hercule a eu recours à un fleuve pour nettoyer les écuries d’Augias, à quoi peut-on faire appel pour redresser le Gabon ?  D’abord, et ce n’est pas limitatif,  aux hommes et femmes d’expérience, compétents, volontaires, travailleurs et patriotes, ensuite aux méthodes et procédures pratiques et opérationnelles, et enfin, aux moyens financiers et aux partenaires sérieux. 

Nos pays noirs francophones doivent nettoyer les saletés héritées de la colonisation et évoluer dans un nouveau cadre à mettre courageusement en place. Il y va de notre dignité, de notre honneur et de notre épanouissement. Il n’y a que sur le continent africain où, après une élection présidentielle, on compte deux Chefs d’Etat et deux Gouvernements. C’est le cas du Gabon et de la Côte d’Ivoire. Cette dernière ajoute la particularité qu’un contentieux post électoral resté inachevé s’est transformé en une guerre, à la fois internationale et civile qui mobilise contre le candidat sortant, les forces armées de la Communauté Internationale, dont la mission de domination dans le tiers monde s’est rendue visible à tous. Mais surtout, les brutalités de l’armée de l’ancienne puissance colonisatrice, la France, qui est aujourd’hui dirigée par une droite composée par un ramassis de nullités et d’abrutis arrogant et égoïste n’ayant de l’Afrique et de l’Africain que mépris et une connaissance approximative. Ramassis au sein duquel brillent quelques habiletés malfaisantes. Cette France dégoutante qui s’est, depuis peu, éloignée de la Liberté et de la Fraternité et qui ressemble davantage à celle d’Adolphe Thiers qu’à celle de Maximilien de Robespierre. Thiers, ce nabot haut comme trois pommes, qui massacra sans scrupules  la Commune en faisant plusieurs morts parmi le Peuple de France. En Côte d’Ivoire, le plan de la Communauté Internationale et de la France vient d’atteindre son but. 

Monsieur Laurent Gbagbo, son épouse, ses enfants et petits enfants ont été capturés comme ils disent. Qu’ils soient emprisonnés ou assassinés comme Lumumba, Ouandié, Moumié, Afana etc, ce ne sera ni la première, ni la dernière fois que cela arrive aux patriotes africains. La famille Gbagbo a déjà été incarcérée dans le passé par le Premier Ministre Ouattara. Mais, que deviendra la Côte d’Ivoire avec son cortège de colères, de haines, de violences ? Il reste aux nouveaux responsables ivoiriens de mettre en exploitation les énormes richesses du pays et de les partager, sur la base des accords et des contrats, avec la Communauté internationale qui elle, continuera à décaisser des fonds en faveur d’un « Gouvernement qui lui donnera forcément confiance ».   
                                                         

1 commentaire:

  1. ce blog gagnerai à etre connu
    analyse fine mais malheureusement très peu pourront comprendre

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