23 mai 2017

A MON AMI ET FRERE, JEANCHRIST MBINA...

Bien aimé JeanChrist ! 

Une fois le demi-siècle franchi, le Corps, l’Esprit et l’Ame entrent dans une cohabitation de type conflictuelle. L’Homme sage vieillissant, courbé sous le poids des ans et soumis à la loi de la pesanteur se tourne inexorablement, avec assurance et confiance, vers le Dieu de l’espérance. Et, avec pour tous bagages ses souvenirs, il chemine à pas lents  sur la voie à sens obligatoire et unique qui le conduit vers les demeures de ses devanciers. Indifférent au temps et à l’espace, il prend davantage conscience de l’inutilité et de la vanité des apparats du monde. L’injustice, la haine et la bêtise humaines lui donnent un dégoûtant ressentiment fait à la fois de tristesse, d’amertume, de détachement ; voire d’étonnement et de raillerie …. 

Frangin ! Comme convenu lors de notre douloureuse séparation, je prends le temps ce jour, pour t’informer sur l’actualité du pays qui est toujours marquée par la sévère crise sociopolitique qu’il traverse depuis des années et qui s’est amplifiée et a culminé lors de l’élection présidentielle d’août. La raison de cette crise se trouve dans le fonctionnement partial et laxiste de nos institutions en charge du management des élections et de l’économie. Tous les gabonais savent que la fonction de Président de la République, Chef de l’Etat,  est la plus importante et la plus prestigieuse dans tous les pays du monde. Et, la France leur a fait comprendre qu’on y accède par la seule volonté du peuple constitué en électorat et décidant à la majorité,  en faveur d’un candidat. 

Dans le passé, certains gabonais avaient déjà été victorieux à l’élection présidentielle sans jamais exercer la fonction suprême. Après la présidentielle de 2009, la population était partagée entre ceux qui disaient que P. Mamboundou en était le vainqueur, et d’autres que c’est A. Mba Obame. Finalement, c’est Ali qui a été déclaré gagnant par la Cour Constitutionnelle. Avec l’aide du temps, on se rend parfaitement compte que 2009 était à la fois la continuation et l’amplification d’un scénario venu du passé, qui préparait l’avenir, et qui doit perdurer. 

JeanChrist ! C’est pour cette raison que je prends le temps de revenir sur un déplorable événement qui avait profondément et terriblement marqué le peuple lors de la présidentielle de 2009. Du reste ce jour là, je t’avais dérangé en pleine nuit pour t’en informer. Comme par une tacite entente, c’est Casimir Oye Mba qui avait été programmé dans « les cœurs des gabonais » pour être le premier Président démocratiquement élu du Gabon post colonial sans Omar. Mais, à la veille du scrutin, il s’était retiré de la compétition sans donner des explications convaincantes. Après cet acte, la déception du peuple fut si grande et inattendue que ce Monsieur réputé  intègre, compétent, expérimenté et digne d’éloges a été qualifié à tort de poltron, de lâche, de vendu, de vaurien  à travers tout le pays. Vrai ou faux, il se murmure même que des personnes qui croyaient en lui « dur comme fer » avaient été frappées de malaises. 

A l’observation des faits actuels, je crois avoir compris et, je vais maintenant te dire ce que j’en pense. Je te le confesse avec un sanglot au fond de la gorge, moi qui fus son fier représentant dans la Province du Moyen-Ogooué. Oye Mba est de souche populaire et modeste. Il s’est embourgeoisé suite à une robuste formation scolaire et universitaire. Comme tous les bourgeois de son origine, de sa nature et de son rang, il est à la fois prudent et altier, de plus, c’est un chrétien catholique qui a fréquenté les milieux ecclésiastiques dans sa jeunesse. Il est donc porteur des valeurs enseignées par l’Ecole française, et des dogmes répandus par la religion catholique qui, à plusieurs des égards, a causé des dégâts dans le pays. 

Oye Mba est l’un des derniers, sinon le dernier intellectuel et cadre gabonais qui a reçu une bonne formation à la coloniale, suivie à l’indépendance d’une prestigieuse carrière professionnelle. Le comportement auguste de l’homme impose admiration et interrogation. Dans un article passé, je citais 4 compatriotes que l’on pouvait considérer comme expérimentés et capables de diriger le Gabon et de redresser la catastrophique situation socioéconomique dans laquelle l’a laissé Omar Bongo et que les émergents ont aggravée. C’étaient : E. Boundono, D Divoungui, C.Oye Mba, J. Ping. 

Puisse cette prédiction se réaliser un jour. Je m’attarde sur cet évènement pour partager mes vues avec toi et avec les gabonais lucides et sincères. Cher Frère ! Si Oye avait maintenu sa candidature, il aurait remporté l’élection en réunissant une très grande part des suffrages. Cependant, cela n’aurait pas suffi pour faire de lui le premier intellectuel-cadre démocratiquement élu par le peuple. Et pour cause… ? Il aurait naturellement été stoppé par la Cour Constitutionnelle comme l’est présentement J. Ping. Et pire, le carnage du 31 août 2016 au QG de Ping n’aurait été que « du pipi de chat » en comparaison à ce qui aurait pu se passer en 2009 suite à une contestation populaire. Oye a été victime des puissantes forces rétrogrades étrangères, françafricaines et gabonaises qui se sont coalisées pour lui barrer la voie qui conduit à la Présidence. Respectueux et soumis à la loi du silence qui est commune à tous les initiés, il n’a jamais osé dire toute la vérité sur son retrait de 2009, et ne le fera peut être jamais publiquement. Chrétien, il a cru qu’il serait rendu responsable du sang des gabonais. Or, ce sont ceux qui ont les outils pour faire couler le sang qui en sont les responsables. Les corrompus et fumistes françafricains blancs et noirs avaient encore ainsi privé le peuple gabonais d’un Chef digne, compétent et respectable. 

JeanChrist ! C’est maintenant le tour de l’autre compatriote que j’avais pressenti pour commander le Gabon. A la différence de Casimir, il est allé au bout du processus électoral, il a mis en place un système anti-fraude qui a bien fonctionné au point d’acculer le pouvoir à recourir à de grossiers expédients pour se proclamer vainqueur. Mais, c’est Ping qui a gagné l’élection de 2016. 

Futé comme un sioux, il a mis en place une stratégie qui se heurte à une forte adversité de la part des mêmes minables françafricains. Il plie sans rompre. Il semble conscient de la difficulté et de dangerosité de la situation et compte sur le peuple, sur tous les patriotes partisans de l’alternance et sur la fraction réformiste et progressiste de la Communauté internationale. En face, le régime émergent d’Ali ne veut rien lâcher. Et, osons dire que: « c’est de bonne guerre ». Ses Agents parcourent le monde pour obtenir des soutiens afin de conserver le pouvoir. 

Cher Frère et Ami ! Cette situation est particulièrement rendue compliquée par l’interférence des affairistes qui détiennent des gros intérêts au Gabon. Ils sont partisans de la continuité sous le label Bongo. Ils sont réfractaires au changement et soudoient hommes politiques français et autres agents internationaux. Je soupçonne Hollande et Valls d’avoir trempé dans ce piteux montage antidémocratique et d’être partis du pouvoir les mains noires de souillures. Quand on a la conscience encombrée, on s’éloigne honteusement de la vérité et l’on pratique l’injustice et le déni des valeurs. Par ce qu’ils n’étaient plus libres, Hollande, Valls et consort ont tourné le dos à la vérité et sont restés aphones ou évasifs sur le drame électoral gabonais. Pauvre France dont les hommes d’Etat vont de scandale d’argent en scandale de mœurs. 

JC, ne se trouve t-il pas une similitude entre le Mal que le gouvernement de Sarkozy à fait au Président Gbagbo Laurent et au peuple de Côte d’Ivoire, et le Mal que le régime d’Hollande fait au Président Ping Jean et au peuple gabonais ?  Dans la nuit du 31 aout dernier, il s’est produit à Libreville quelque chose d’inhabituelle, de terrible, d’incroyable, d’inqualifiable, d’inimaginable, d’incompréhensible… du jamais vécu au Gabon. Des hommes armés auraient tiré sur des gabonais les uns à partir d’un hélicoptère, d’autres au sol faisant des morts parmi les partisans rassemblés au siège de Ping. Au vu des photos, des pleurs et des colères des gens, j’ai pensé au temps où nous étions jeunes, solides et pleins d’énergie. Mon Frère! Il n’y a vraiment de Dieu que Dieu. Si nous nous étions enrichis auprès d’Omar, au point d’amasser les sous et être multi milliardaires comme certains, nous aurions certainement aussi eu un jour un candidat à une élection présidentielle. Et, on se serait donné les moyens, tous les moyens nécessaires pour accéder au pouvoir. Une violente empoignade avec ceux d’en face aurait alors provoqué un véritable carnage qui aurait terriblement endeuillé le peuple gabonais. C’est pour cette raison que j’affirme qu’Ali a compris le système politico-électoral africain, il s’est préparé en conséquence  et a pris toutes les dispositions pour son projet. Dieu est grand pour nous avoir appauvris…

Bien aimé JeanChrist ! En Afrique aujourd’hui, quand on n’est pas capable d’affronter le sang, il ne faut jamais  prendre le risque de postuler à la fonction de Chef d’Etat en participant à une élection présidentielle.  

Te souvient-il de ce que nous avons fait en 1990 à Port-Gentil lorsque J. Redjambé a été assassiné ? Président du PGP, nous avons formé, sous la supervision d’Ogandaga (paix à son Ame), des Groupes pour réclamer la justice…. Ces moments me sont revenus en mémoire. Aujourd’hui, quelques uns de nos compagnons de cette époque ont vieilli et sont en partance comme moi. D’autres ne sont plus. Que sont devenus J.P. Wora, G.Ogoula, Ravot, Raouto, A. Ambourouet, Edzoudzwa, Mbourou, Apérano, Akeraguelo, Jo Man… et j’en oublie ? 

Bien sûr, ça nous a valu la torture, la prison, le chômage, le mépris. C’est le sort et le traitement habituels réservés aux opposants radicaux par les pouvoirs politiques des Etats africains. Nous en reparlerons prochainement…. Tu n’en croiras pas tes oreilles. Pour la première fois depuis l’avènement du PDG, les auteurs de détournements des deniers publics, sur le tard, ont été sanctionnés mais pas tous. On se demande comment les autorités et les organes de contrôle de la gestion publique ne se sont pas aperçus de la sortie d’autant d’argent du trésor public. Ni le Chef de l’Etat, ni le Chef du Gouvernement, pas même la Cour des Comptes n’ont rien vu. Dire que les sommes volées se chiffrent à des centaines de milliards en 7 ans. Le Gabon ne va pas bien. 
Tiens ! La CAN se jouait  encore au pays cette année et les panthères ont lamentablement été éliminées dès le début du tournoi. Pour cause de douleurs mentales et spirituelles  internes, je ne me suis pas rendu au stade. A ce sujet, nombreux avaient, à juste titre, appelé au boycott de la compétition. 

Frangin ! Le Foot n’est plus celui de notre jeunesse, quand à pieds, nous partions en sécurité, au lever comme au coucher du soleil, du Lycée Léon Mba au stade RP Lefebvre pour voir jouer Abeilles, Réal, Olympique, Bessieux, Chargeurs Réunis, Monaco, Pigeon vert, Lycée Technique-CAPO et surtout l’ASLM-VB…Et pour applaudir Amadji Adetona, Ndong Démagnard, Ekomo le Grand, Bevigna, Jean Ping, Lamine Diop, Jerôme Mikala, Bayonne Paul,  J.Ewomba, Jean Rémy Issembe, Ango Pelé, Sino, Paul Manon,  Kocsis, Jean Boniface Assélé, Pierre Claver Mvelé, Bruno Kuadjovi, Posso, Alvaro, Espérandézi, Jean François Ntoutoume (Jaky Dex), Assapi, Moumbamba, Fouda, Walker Bikinda, Christian et  Jacques Adiahenot, Ossey Rampart, Taman Makaya, Aboghe, Alpha Chakirou, Jean Obiang, Kassa Martin, Sickout Roger, Katsanis, René Ndemezo’o, Abessolo Edou et d’autres talentueux aînés dont les performances nous ont communiqué l’amour du beau football. 

JC, Comme Christ a pleuré sur Jérusalem, je ne cesse de pleurer, non sur Libreville mais sur le pays tout entier qui a été dévergondé et avili par les forces des ténèbres. Souvent je pense à nos discussions, à nos rêves de jeunesse et à nos projets d’adulte sur le devenir du Gabon et son introuvable grandeur. 

Encore maintenant, seul j’observe le Gabon, je cogite et je murmure à voix basse avec un vif pincement au cœur : « si vieillesse pouvait ». 

JeanChrist ! Pour terminer je te souhaite une bonne année 2017, Toi qui es désormais dans la félicité divine et éternelle, loin des turpitudes de ce monde de voyous et de saligauds qui ont pris partout les peuples en otage. Voilà l’essentiel des difficultés que nous vivons en attendant la tenue du prometteur « Dialogue gouvernemental ». Bien à toi Fraternellement

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire