Ah !
Si nous avions été en finale de la CAN ! « Faute de grives, on mange
des merles : quand on n’a pas ce que l’on aime, il faut se contenter de ce
que l’on a ». Nos panthères ont fait ce qui était à leur portée ; ils
nous ont mobilisé et fait vibrer en l’espace de 4 matchs. Les réactions
juvéniles observées chez certains d’entre nous traduisaient une projection
sentimentale fusionnellee et patriotique que seuls les évènements d’apparence
neutres peuvent provoquer. Le retour à l’enfance, voilà la grande vertu du
sport, ce domaine des passions populaires et collectives.
Quoique
décevante, l’élimination des Panthères en quart de finale de la CAN n’a pas
surpris et choqué les observateurs avertis et les anciens footballeurs. D’une
part parce que le coup d’essai aurait été un vrai coup de maître si le Gabon
avait remporté la CAN ; d’autre part, une finale opposant le Gabon à la
Zambie aurait été d’une cocasserie inouïe et chargée d’une forte dose
d’émotion.
Deux évènements-souvenirs sont certainement revenus à la mémoire d’une
grande partie de nos compatriotes; en particulier ceux qui sont âgés entre 35
et 55 ans. Le premier souvenir, douloureux et triste, est la mort tragique par
crash d’avion, de 18 footballeurs Zambiens au large de Libreville. Dix-neuf ans
après, l’équipe nationale de la Zambie vient de jouer et de gagner une finale
de la CAN au Gabon qui deviendra, à coup sûr, pour ses joueurs une terre de
gloire et de recueillements sacrés.
Le souvenir du crash aurait indubitablement
plané sur une rencontre Gabon-Zambie. La victoire de la Zambie sur la Cote
d’Ivoire à la finale est méritée. Elle a été porteuse d’émerveillement et
relève de la justice. Non point seulement de la justice pour les vivants, mais surtout
de la justice rendue aux footballeurs zambiens décédés dans notre pays qui est
hautement mystique. Cette victoire a comblé de bonheur tous ceux qui ont le
cœur tendre et qui n’oublient pas le passé, dès lors qu’il est entaché de
compassion, de regrets et d’inachevés. Il nous a été agréable d’entendre le
coach de la Zambie dire à la fin du match : « nous étions poussés par
une Puissance… », Puis d’évoquer Dieu.
Il existe des forces bienfaisantes
qui peuvent, à certaines grandes occasions, se rendre disponibles, pour assister
et aider un homme ou un groupe d’hommes afin de leur permettre de réaliser un
noble rêve. L’équipe du Coach Renard et du Capitaine Katongo vient de nous en
faire la démonstration. Ceux qui ont regardé la finale CAN à travers le monde peuvent, en revivant à
postériori le déroulement du match intérieurement en eux, sentir et se rendre
compte de la manière dont la victoire des zambiens, au fil du match, se dessinait
inexorablement et comme par extraordinaire.
Du pénalty raté de Drogba au tir ailleurs de Gervinho, quelque chose semblait
préserver la victoire au profit de la Zambie. Sans méconnaitre la virtuosité
des joueurs ivoiriens, il faut magnifier ces zambiens qui viennent de vivre en
terre gabonaise, une merveilleuse histoire qu’ils n’oublieront jamais.
Jamais,
parce qu’ils viennent d’obtenir récompense et reconnaissance de la part de nos
mannes et de nos populations. Parce qu’ils viennent de recevoir de la part des
footballeurs défunts de leur patrie un fort signe de solidarité et d’Amour.
Parce qu’ils viennent de faire d’une portion de la plage souillée de Libreville
un lieu de rémission des maux, de sanctification des esprits et de purification
des corps. Aux bouquets de fleurs donnés à la mer par nos frères et hôtes, la
mer leur a offert en retour la Coupe d’Afrique des Nations, Graal qui a couronné
le mérite d’un succès héroïque tiré d’un troublant sacrifice.
Le second
souvenir est pour ceux, plus âgés, qui ont suivi la finale de ce qui peut est
considéré, sans ’excès, comme la dernière grande coupe du monde. Celle de 1970
au Mexique, qui a été remportée et conservée par la sélection du Brésil. Le plus
grand artisan de cette victoire avait été cet homme vieillissant qui vient
d’être honoré par le Gabon et la Guinée Equatoriale et leurs deux Chefs d’Etat.
Cet homme de 72 ans qui marche maintenant, Ô temps destructeur ! avec
quelque peine et dont le corps est soutenu par des jambes et des pieds qui ont
été reconnus comme les plus adroits et les plus habiles par les spécialistes du
football mondial.
Cet homme aux exploits innombrables et inégalables qui a
légué au sport le plus populaire de la planète, un gros et prestigieux héritage
qui ne sera jamais totalement partagé par ses successeurs.
Cet homme est lui
aussi revenu dans notre pays où naguère,
il avait permis aux amoureux du foot de passer quelques instants de bonheur en
sa compagnie. Cet homme, c’est Edson Arantes Donascimento : PELE.
Pelé au Gabon lors de la CAN 2012 |
Je pense
ici à tous ceux qui, gamins, ont
commencé à découvrir le foot quand Pelé jouait déjà, et qui prenaient pour
surnom Pelé. C’est durant la coupe de 1958 que les rares experts internationaux
attentionnés et connaisseurs passionnés du ballon rond découvrirent que les
amoureux de ce sport s’étaient constitués en un Peuple qui constatait,
émerveillé, qu’un Roi était né et s’imposait à eux.
Ainsi, Pelé fut intronisé
Roi à 18 ans. Il demeurera Roi de ce
royaume jusqu’à sa mort, tous les princes attendront Il a donné au foot ce qu’aucun joueur n’avait
donné à ce sport avant lui et qu’aucun joueur ne lui donnera jamais après ;
même si les gestes seront toujours les mêmes qu’au temps de la consécration de
Pelé.
La statue de Pelé au Stade de l'Amitié au Gabon (Libreville) - CAN 2012 |
Mais Roi, il a donné à ces gestes une dimension qui ne sera point égalée
parce qu’il a mis l’harmonie du
mouvement du corps, la beauté et le style du jeu et la puissance des gestes au
service de l’efficacité qui a pour objectif
le but, le goal. Jeune lycéen, j’ai vu et touché cet homme à la plage du
Lycée Léon Mba en compagnie de Vito et de Rildo, nous lui avons demandé de nous
monter ses pieds et il l’a fait, il a signé sur les photos de lui que nous
avions en collection. A ce jour encore, j’ai une profonde admiration pour lui.
Je l’ai vu il y a quelques jours en compagnie
des personnalités connus, les deux chefs d’Etat des pays organisateurs de la
CAN bien sûr, mais surtout de l’un de mes aînés avec qui, étudiants en France,
nous partagions, lui, Serge et moi, une folle admiration pour ce génie du foot,
oui, j’ai vu René Ndemezo Obiang, ancien footballeur de talent qui calquait,
par mimétisme, son style de jeu sur Pelé. J’ai imaginé toutes les pensées qui
trottaient dans sa tête de Ministre des sports, ancien joueur de foot,
participant aux côtés du Roi de sa jeunesse, à la plus belle fête de foot du
continent. Heureux as-tu été René.
J’ai aussi aperçu Gaston Mondzogo et Pierre
Odounga autres admirateurs du Roi. Je ne me suis pas privé de penser à quelques
autres fans du Roi de notre jeunesse : Hervé Ossamané, Alain Ondo, Moise Nsole Biteghe, Jerôme Mikala, Dieu Donné
Dibady, Victor Ndong Mba, Roger Sickout, Michel Menga, Vincent Essono Mengue, Martin
Kassa, Soukous Mikouma, Paul Bayonne, Henri Bignoumba, Katsanis, Herbin
Mihindou, Nanda Raouto, Modeste Obiang, Mathieu Douna, Calixte Nsie, Jean Baptiste
Babadounga,Vincent Essame, Christian Mba etc. et bien d’autres qui ne sont
plus. Deux présidents de la République viennent de rendre hommage à un Roi qui
a énormément donné à l’humanité, et qui pourtant n’a pas suffisamment reçu du
monde du foot ; tant en gloire qu’en numéraire.
En le gardant quelques
jours chez nous, les Présidents Bongo Ondimba et Obiang Nguema ont posé un acte
qui a honoré tous ceux qui ont aimé, qui aiment le beau foot et qui ont été
reconnaissants à ce jeune nègre de 18 ans qui lui a donné un Royaume dès 1958.
Merci Messieurs les Présidents pour nous avoir ramené dans l’enfance pendant
quelques jours.
Celui qui dit que le sport n’a rien en commun avec la politique
n’est qu’un menteur. La CAN vient de confirmer que tout revient directement ou
indirectement à la politique qui est au cœur de tous les évènements de toute société.
Un peuple peut vibrer à l’unisson grâce aux exploits sportifs. Nous savions que
le défunt Président aimait la boxe. Mais, très peu parmi nous savait que le
Président Ali était un amoureux du foot et qu’il était gaucher comme Philippe Doucet.
Qui pouvait penser qu’il allait prendre le temps de se consacrer à cette
manifestation en s’impliquant aussi fortement à la CAN?
Pourquoi le Président
Ivoirien s’est-il déplacé pour voir la finale de la CAN ? Sans
considération subjective, la CAN s’est bien déroulée au niveau sportif ;
mais pas en ce qui concerne l’implication des nationaux à son intendance. Mea
Culpa, j’étais du nombre des sceptiques qui avaient des réserves sur la
réussite sportive de la CAN au Gabon. Par souci d’honnêteté et pour la postérité je le confesser, puisque je l’ai écrit. Bravo les Panthères.
Bravo Messieurs le
Ministre des sports et de la Fégafoot !
Bravo et merci aux Présidents du
Gabon et de la Guinée Equatoriale !
Cependant, nous répétons que les simples
citoyens gabonais n’ont pas profité de la manne de la CAN en ce qui concerne
les locations des logements, des véhicules et la restauration. Mesdames,
Messieurs, Tout n’est que politique, ironie et passe-temps.
Il faut maintenant
que le Chef de l’Etat et son Gouvernement mettent en place un système fiable
pour l’entretien, l’exploitation et la rentabilité de belles infrastructures
réalisées pour le pays.
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