21 avr. 2013

CONGRES DU PDG, STATU QUO OU CHANGEMENT : VERS UNE CONSOLIDATION REPUBLICAINE DE L'EMERGENCE ?


Après certains autres partis de la Majorité, le parti le plus ancien, le plus riche, le plus expérimenté, le plus décrié, le plus mobilisateur et le mieux implanté ; celui qui gouverne sans discontinuité le Gabon depuis le 12 Mars 1968 (45 ans) se prépare à organiser un congrès qui peut, soit constituer un évènement majeur de la vie politique du pays, soit être une banale partie de jactance. Attendons pour voir !  

Il se dit ces derniers temps qu’un congrès du PDG est en préparation. Ce congrès survient dans un contexte marqué par quelques évènements sociopolitiques relativement importants qui sont : l’écrasante victoire du PDG aux dernières législatives suivie de la formation d’un gouvernement totalement PDG, la demande insatisfaite de la tenue d’une conférence nationale souveraine par l’opposition, la société civile et les populations, les négociations politiques de Libreville entre gouvernants et rebelles centrafricains, les travaux de la Commission nationale de la CEMAC en vue de la présidence gabonaise de l’Institution,  la levée de l’immunité d’un sénateur PDG et sa traduction devant la justice, les scandales relatifs à l’accroissement des crimes rituels, aux détournements des fonds publics ou para publics, mettant en cause les personnalités du PDG …Et, bien évidemment, les prochaines élections locales, sénatoriales et la présidentielle de 2016.


Rappelons que le PDG a, hérité du Comité Mixte Gabonais (CMG) de Léon MBA et du Bloc Démocratique Gabonais (BDG) de Paul GONDJOUT et  Léon MBA. C’est le PDG qui a dirigé le Gabon jusqu’aujourd’hui à travers deux personnalités : Omar et Ali BONGO.

Depuis la création du PDG, et avant le déplacement  du poste de Premier Ministre chez les Fang du Woleu-Ntem, ce poste a longtemps été occupé par les ressortissants Fang, toujours mâle, de l’Estuaire.

Quant au poste de Secrétaire Général du PDG, il  n’a jamais été occupé, ni par un Fang, ni par une femme. Le Secrétariat Général du PDG a tour à tour été dirigé par L. AUGE, J. ADIAHENOT, S. NGUEDET MANZELA et F. BOUKOUBI. Le prochain congrès sera-t-il celui du changement et de l’innovation ?

A son accession au pouvoir, le Chef de l’Etat Ali BONGO n’a pas jugé opportun de dissoudre le PDG, de le transformer, de le réformer ou de réorganiser sa direction. Il a conservé les choses en l’Etat, il a cependant créé un cadre pour le rassemblement  de ses  partisans dénommé la Majorité Républicaine pour l’Emergence (MRE), qui est une variante de la Majorité présidentielle de son devancier Omar Bongo avec, en moins, sa maestria dans la gestion de ses alliances, de ses alliés et de ses opposants politiques.

Le congrès du PDG est celui du parti qui domine la majorité républicaine, et, les résolutions qui en sortiront sont très attendues par ses compagnons politiques qui se plaignent, en silence, de leur écrasement et de leur marginalisation, toutes choses qui les fragilisent et les discréditent  aux yeux des populations qui ne perçoivent pas  la nécessité de passer avec cette formation politique un contrat qui est inopérant et problématique. Le PDG reste dominant dans le pays, au Parlement, au Gouvernement, dans les conseils locaux, dans les administrations centrale et locale, dans les entreprises, dans la MRE.

Présentement, deux situations ternissent toute la vie politique gabonaise : d’une part, les sanctions, les contradictions et les divergences qui minent l’opposition, d’autre part, le cavalier seul du PDG dans une majorité en apparence unie, mais en réalité sans âme et insuffisamment soudée. Seuls les partis de la MRE qui sont dirigés ou apparentés aux anciens membres du gouvernement, dignitaires et très hauts cadres du pays sont actifs sur le terrain. Ce sont entre autres le RPG, le PGCI, l’ADERE et le CLR.
Les autres partis font le nombre, sans réellement prendre une position et une place déterminantes dans le groupe. Les rumeurs relatives à la composition de l’équipe qui prépare le prochain congrès laissent entendre que les dirigeants et hiérarques actuels du PDG ne sont pas impliqués dans cette phase de travail préparatoire. Signe des temps ?

Ce congrès, pour être historique, devrait déboucher sur l’une des résolutions suivantes.
1- Garder la dénomination du parti mais le transformer de fonds en comble en changeant ses équipes dirigeantes nationales et locales.

2- Dissoudre le PDG et créer un nouveau parti sur ces cendres. La seconde hypothèse comporte le risque, soit  de susciter la naissance de nouveaux micros partis, soit de pousser certains anciens pédégistes « dans les bras de l’opposition ».

Objectivement le PDG est devenu une structure obsolète et vieillotte dont le fonctionnement et l’image ne correspondent plus aux exigences de la vie politique du Gabon qui est irréversiblement tournée vers la démocratisation des institutions républicaines qui peinent à éclore.  A n’en point douter, la disparition du PDG de la scène politique représenterait un évènement surprenant, un tournant dans la réorganisation des forces politiques gabonaises.

Le moindre mal pour l’Emergence voulue par Ali Bongo Ondimba, qui est condamnée à la réussite, consiste à se démarquer progressivement des pratiques anciennes, dont malheureusement, les stigmates apparaissent encore avec ténacité dans les comportements et les actes de certains nouveaux dirigeants.

Le PDG a trop souvent été accusé, à tort ou à raison. Il a été rendu responsable de plusieurs maux et actes crapuleux, irresponsables, illégaux, immoraux qui lui ont donné  un profil hideux, fait de cupidité et de vénalité. Bien sûr, le PDG ne laisse aucun gabonais indifférent, les jeunes, adultes et vieux qui l’ont connu ont un souvenir joyeux ou douloureux de cette machine qui a régné en toute tranquillité pendant près d’un demi-siècle sur le Gabon.

En fin stratège politique africain, calculateur et rusé, son fondateur a su, à chaque  période de vives tensions internes, étouffer les contradictions qui le menaçaient d’implosion ou d’explosion. Ce parti qui compte de nombreux membres ayant entre 20 et 40 ans de militantisme gagnerait à se reconstruire, à se refaire une santé ou à laisser place à une nouvelle génération, plus jeune et plus dynamique…

Toute société comporte deux grands pans qui sont l’Economique (et le financier) et le Politique (et l’institutionnel). Par leurs relations fusionnelles, ces deux blocs donnent à toute société sa logique, son caractère, ses références. On ne peut pas avoir un projet de développement économique et social qui se veut libéral et novateur, et l’accompagner d’une organisation politique anachronique, désuète et anti démocratique comme cela a été pratiqué sous le PDG-Unique.

Pour que la politique de l’émergence du Président Ali soit crédible à l’international et donne confiance aux gabonais au niveau national en interne, il faut mettre en harmonie la libre entreprise proclamée dans son projet de société et  confirmée par les choix de sa « diplomatie économique », avec un système politique démocratique, républicain assis sur la liberté d’expression, la solidarité et le respect des minorités.

Dans l’hypothèse haute, très aléatoire et improbable, qui est la création d’un nouveau parti politique, les nouveaux responsables, nouveaux stratèges de celui-ci devraient définir une ligne politique qui reflétera cette recherche de cohérence entre l’économie, le politique et le collectivisme social et civil qui assure plus ou moins convenablement, la synergie entre la structure économique et la sphère politique en les consolidant.
La création d’un nouveau parti, au sortir du congrès du PDG, peut aussi susciter des ajustements et des repositionnements au sein de la MRE. Si le PDG reste en place après le congrès, il y a à craindre qu’en cas de changement et de pertes de privilèges par certains, des sentiments de vengeance, de frustrations et des revendications se manifestent du côté de ceux qui voudront se faire passer pour les héritiers et les dignes dépositaires de ce legs de feu Omar Bongo qui lui-même l’a reçu de Paul Gondjout et de Léon Mba.

Le Gabon émergent va-t-il avoir le courage de tourner une page de l’histoire politique étatique du pays ? L’a-t-il  suffisamment lue pour décider de la déchirer ou de la mettre à l’écart ?  Est-il bien outillé pour impulser une nouvelle dynamique sociopolitique nationale ?

Le congrès et surtout l’après congrès du PDG nous le dira. Si l’appellation PDG demeure, il risque d’y avoir un vrai chamboulement dans la composition des organes responsables. Si l’appellation change, une mini bombe politique va exploser dans le cosmos politique.

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